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L'IGF à Rio et les deux sortes de questions que pose la gouvernance de l'Internet

Première rédaction de cet article le 16 novembre 2007


Le Forum de la Gouvernance de l'Internet vient de se tenir à Rio de Janeiro et, comme d'habitude, on a beaucoup parlé. Quelles étaient les questions posées ?

Le Forum a été très confus, des tas de sujets sont passés dans tous les sens, la plupart très obscurs, même pour l'initié (une prime au nouveau concept de post-multistakeholderism que n'auraient pas renié Derrida ou Foucault). Dans un modeste effort pour apporter une contribution au débat, je propose de classer les questions posées en deux catégories, en empruntant et en déformant une terminologie de Michel de Pracontal : il y a les vraies questions et les bonnes questions.

Les vraies questions sont celles qui sont importantes, qui comptent, qui façonnent notre avenir. Le multilinguisme, l'accès aux NTIC pour tous, notamment dans les pays pauvres, la liberté d'expression, etc. Elles sont importantes, vitales, même, mais ne peuvent pas être résolues, en tout cas pas à court terme, et surtout pas par un organisme de discussion comme le FGI. Et, surtout, elles ne nécessitent pas forcément de décisions au niveau international. Pour le multilinguisme, par exemple, à part le point très particulier des IDN dans la racine du DNS, l'effort essentiel est à faire au niveau local ou régional. Ni l'ICANN, ni l'IETF, ni l'UNESCO ne peuvent faire grand'chose pour accelérer ou retarder le dévelopement du multilinguisme (qui dépend plutôt d'actions concrètes).

Et il y a les bonnes questions. Ce sont celles qui ont objectivement beaucoup moins d'importance (l'utilisateur de base se moque probablement de savoir si AfriNIC alloue au minimum des /22 ou des /21) mais ce sont celles sur lesquelles on peut avancer concrètement, celles sur lesquelles le mot « gouvernance » peut avoir un autre sens que « bla-bla ».

En effet, une autre caractéristiques des bonnes questions est qu'elles sont obligatoires. On ne peut pas ne pas y répondre. Quelqu'un doit gérer la racine (cf. RFC 2826). Quelqu'un doit attribuer les adresses IP pour qu'elles restent uniques. Il est amusant que, pendant le FGI, les représentants de l'ICANN répétaient tout le temps qu'il fallait s'intéresser aux questions d'accès, sur lesquelles l'ICANN ne fait rien, plutôt qu'à « des disputes mesquines sur la gestion des ressources techniques », justement ce que l'ICANN contrôle. Ce sont toujours les gens au pouvoir qui disent que le pouvoir n'est pas si important et qu'on ne devrait pas se focaliser sur le pouvoir, qu'on devrait voir plus largement.

Inversement, certains gouvernements, comme le chinois, étaient ravis de se focaliser sur la gestion de la racine, pour faire oublier leur triste bilan, par exemple en matière de liberté d'expression.

Bref, l'avenir de la gouvernance de l'Internet nécessite un équilibre entre les vraies questions, dont il ne faut jamais oublier qu'elles sont les plus importantes, et les bonnes questions, sur lesquelles on peut agir à court terme. Félicitons le ministre de la culture brésilien, Gilberto Gil, pour avoir rappelé à plusieurs reprises que l'Internet étant international, il ne devrait pas, pour aucun de ses aspects, dépendre d'un seul pays.

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