L. Eggert (NetApp)G. Camarillo (Ericsson)October20122012-10-18
Autrefois, du temps des débuts de l'IETF,
les seules réunions ayant un statut officiel étaient les réunions
formelles des groupes de travail. Avec le temps, elles sont devenues
tellement formelles (et n'ayant plus guère de rapport avec un « groupe
de travail ») qu'un type de réunions plus légères est apparu petit à
petit, les BOF (Birds Of a
Feather). Les BOF étaient au début simples et
faciles à organiser, comme l'étaient les groupes de travail des
débuts. Mais elles se sont ossifiées petit à petit, devenant aussi
formelles qu'un groupe de travail, et ayant même leur propre
RFC, le . Continuant cette évolution logique, des participants à
l'IETF ont créé un mécanisme léger alternatif aux BOF, les Bar BOF,
qui étaient comme leur nom l'indique, des réunions faites au
bistrot. Maintenant, on parle de fixer des
règles pour les bar BOF...
Les bar BOF sont fréquentes pendant les réunions
physiques de l'IETF. Elles se réunissent
souvent dans un bar, d'où elles tirent leur nom, et permettent de
discuter de manière complètement informelle, de nouvelles idées qui
donneront peut-être naissance plus tard à un groupe de travail, voire
à un ou plusieurs RFC. Elles ne sont pas
mentionnées dans l'agenda officiel et n'ont aucun statut
particulier. N'importe qui peut organiser une bar
BOF comme il veut (alors que l'organisation d'une BOF est
désormais toute une affaire, décrite dans le ). Elles ont déjà été mentionnées dans un RFC, le
fameux Tao ().
La malédiction se poursuivant, certaines bar BOF
sont devenues tellement formalistes qu'on peut se demander si certains
ne réclameront pas bientôt statuts et règles pour ces réunions. Ce
essaie de bloquer cette tendance, en plaidant pour
que les bar BOF restent complètement
an-archiques.
Car ce n'est pas le cas : on voit de plus en plus de bar
BOF tenues dans les salles de réunion (et plus au café),
avec les chaises organisées comme dans une salle de classe, des
orateurs situés sur l'estrade, un tour de parole, des présentations
faites avec PowerPoint et, surtout, plus de
boissons du tout...
Ce RFC signale que cette évolution peut être due en partie au fait
que le terme bar BOF est trop proche de BOF et que
les débutants mélangent les BOF (dotées d'un statut, celui du ) et les bar BOF. C'est au
point que certains participants, voulant aboutir à la création d'un
groupe de travail, se sentent obligés de faire une bar
BOF uniquement parce qu'ils croient qu'une règle de l'IETF
impose cette étape ! Les auteurs du RFC recommandent donc de parler
plutôt de « réunion parallèle » (side meeting).
Et, pour que ces réunions parallèles se passent bien, notre propose quelques conseils. D'abord (section 2), comment
gérer les invitations. Une réunion parallèle doit être
petite (« uniquement les gens nécessaires et pas
plus »). Il ne s'agit pas, comme c'est souvent le cas pour les BOF, de
sonner le clairon pour ramener le maximum de gens, espérant ainsi
montrer que le sujet est considéré comme important par la
communauté. On ne devrait donc pas faire d'annonce publique d'une
réunion parallèle (par exemple, sur une liste de diffusion). Si on le
fait, on risque de manquer de chaises dans le bar, et de ne pas
pouvoir s'entendre d'un bout de la réunion à l'autre, menant à des
réunions excessivement formelles, avec tour de parole. (Plusieurs
bar BOF ont déjà souffert de ce syndrôme
« apéro Facebook ».)
Bref, pas de touristes à une réunion parallèle, uniquement
« a few good people », des gens qui vont activement
participer au travail (l'IETF ne décide normalement pas sur la base du
nombre de participants mais sur le nombre de gens qui vont
effectivement bosser). L'implication plus large de
la communauté viendra après. La réunion parallèle doit avant tout
rester du remue-méninges, chose qui ne se fait
pas dans des grands groupes. Par définition, les idées exprimées lors
d'une réunion parallèle sont incomplètes et imparfaites et il faut
pouvoir les discuter franchement.
De même, on n'est pas obligé d'inviter un
membre de l'IESG ou de
l'IAB en croyant que cela fera plus sérieux et
plus crédible.
Après le Qui, la section 3 couvre la question du Où. Comme leur nom
l'indique, les bar BOF se tiennent
traditionnellement dans les bars. Mais la tendance récente est de la
faire souvent dans les salles d'une réunion IETF, en partie parce que
cela fait plus « sérieux ». Notre RFC, qui
n'hésite pas à descendre dans les détails concrets, note que les bars
sont souvent bruyants, ce qui pose un problème notamment pour les
non-anglophones (le bruit gène beaucoup plus lorsque la conversation
est dans une langue étrangère). Pour garder la convivialité, en supprimant le bruit,
le RFC recommande de choisir un restaurant calme, voire de prendre une
arrière-salle du bar. Les salles de la réunion IETF sont en général
trop « salle de classe », un environnement qui ne convient pas au
remue-méninges entre pairs. Cet environnement est bon pour les présentations, pas pour
les discussion.
Toujours concret, le RFC note enfin que se réunir dans un bar ou un
restaurant permet souvent de... manger. En effet, certaines réunions
IETF se tiennent dans des endroits où le ravitaillement est difficile
et la réunion d'Anaheim (IETF 77) a ainsi laissé un
souvenir particulièrement cuisant. Sortir est donc souhaitable.
Après le Qui et le Où, le Comment. La section 4 s'insurge contre la
tendance de plus en plus marquée à singer les réunions des groupes de
travail. On voit ainsi des réunions parallèles ayant un agenda
formel, des présentations avec supports, des
organisateurs qui se présentent comme bar BOF
chair. Les auteurs de notre RFC craignent que ce cirque
provoque des réactions pavloviennes chez les participants, les
faisant se comporter comme si la réunion parallèle était déjà devenue
un vrai groupe de travail. Ces réunions qui caricaturent les réunions
officielles ne sont pas très efficaces, et elles entraînent des
confusions chez certains participants qui croient qu'il s'agit de
réunions officielles, simplement parce qu'elles en ont
l'apparence.
Enfin, le Quand, en section 5. La principale recommendation est que
les réunions parallèles, comme elles visent à commencer le travail
pour résoudre un problème précis, n'ont pas forcément vocation à être
toujours parallèles à une réunion IETF, elles peuvent parfaitement se
tenir en parallèle d'une réunion RIPE,
NANOG ou équivalent.
Et une anecdote amusante : comme obligatoire, ce RFC a une section
« Sécurité ». Elle contient l'avertissement qu'on a constaté un oubli
fréquent des portables dans les bars, après une
réunion parallèle trop arrosée...