Le passage des œuvres de Guillaume Apollinaire dans le domaine public
(94 ans après sa mort, ce qui donne une idée du niveau de délire
atteint par le droit soi-disant d'auteur)
est l'occasion de revenir sur un point de vocabulaire important :
contrairement à ce qu'on écrit souvent, ses œuvres ne sont pas tombées
dans le domaine public, elles y sont montées.
La nuance est d'importance car le terme le plus courant, « tombé
dans le domaine public », est idéologiquement très chargé. Il vient
des défenseurs de l'appropriation
intellectuelle et sous-entend que le domaine public est
une chute en dehors du monde (forcément plus élevé) du contrôle par
les ayant-trop-de-droits.
Voilà pourquoi je reprends les gens qui utilisent ce terme erroné
et que je dis que les œuvres d'Apollinaire sont montées dans le
domaine public. Pour citer dwarfpower, « l'œuvre sort du
patrimoine personnel pour entrer dans le patrimoine humain ».
D'autres termes seraient possibles. J'ai lu des suggestions de
dire :
« élevé dans le domaine public » ce qui serait un meilleur
contraire à « tombé » (« monté » serait plutôt le contraire de « descendu »). Pourquoi pas ?« entré dans le domaine public », terme qui semble à ses
défenseurs plus neutre, entre les extrêmes que sont « tombé dans le
domaine public » et « monté dans le domaine public ». Mais je ne vois
pas pourquoi il faudrait être neutre : je pense moi aussi qu'appartenir à tous est moralement et politiquement supérieur à
n'appartenir qu'aux héritiers.« libéré ». Là, par contre, cela me semble une erreur : un
auteur peut parfaitement décider de publier sous une
licence libre (c'est le cas de ce blog), son œuvre ne sera pas pour
autant dans le domaine public (le droit moral
s'y opposant).
Bref, je préfère « monté ».