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Mon livre « Cyberstructure »

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Fiche de lecture : Google-moi

Auteur(s) du livre : Barbara Cassin
Éditeur : Albin Michel
978-2-226-17259-4

Première rédaction de cet article le 12 février 2007


La place qu'occupe désormais Google dans l'utilisation du Web a de quoi inquiéter. Un quasi-monopole de la recherche sur le Web et surtout une « part d'esprit » (comme il y a des parts de marché) qui éclipse non seulement les autres outils de recherche mais également toutes les méthodes d'accès à l'information.

Combien d'utilisateurs, par exemple, tapent "Wikipédia" dans Google pour aller sur l'encyclopédie en ligne, au lieu d'utiliser son adresse, http://fr.wikipedia.org/, seul moyen fiable d'arriver sur l'encyclopédie et pas, par exemple, sur un site qui en parlerait ?

Malgré cette place prise par Google, on voit encore peu de livres qui analysent sérieusement ce phénomène. Ceux publiés en anglais parlent de l'entreprise Google, mais pas tellement du rôle que joue son principal outil, le moteur de recherche. Le livre de Barbara Cassin, dont le quatrième de couverture annonce « un essai polémique », semble donc intéressant.

Mais il ne tient pas forcément ses promesses : emportée par la polémique, l'auteure fait feu de tout bois contre Google. Rien n'est acceptable dans cette entreprise, surtout pas le fait qu'elle parle anglais (comme si un monopole d'une entreprise francophone aurait été plus acceptable). La polémique s'étend d'ailleurs, sans qu'on voit bien le rapport, à des entités dont le seul point commun avec Google est de concerner l'Internet, comme Wikipédia, pourtant organisation ouverte et publiant sous licence libre, à l'opposé du géant de la recherche, très fermé et défendant fermement sa propriété intellectuelle. (Pour des raisons que j'ignore, Eurid a également droit aux foudres de l'auteure, mais pas Verisign.)

Cela mène souvent à des critiques très injustes, par exemple contre les « conditions générales d'utilisation » de Google, qui disent en substance que Google n'est responsable de rien et ne garantit rien... comme 100 % de ces textes, français ou états-uniens, que peu de gens lisent avant de cliquer « J'accepte ».

Il y a peu de réelle analyse et il y a confusion de beaucoup de niveaux dans ce livre. Le ton est très pédant (peut-être pour montrer que, contrairement à ces sauvages d'états-uniens, en France, on est cultivés), avec citations de Platon, Kant, Spinoza et Hannah Arendt à toutes les pages. Le fait d'écrire les mots en anglais dès qu'ils concernent Google, alors qu'ils sont écrits en français dans d'autres contextes, est prodigieusement exaspérant.

Plus agaçant encore, les erreurs sont nombreuses, de http://fr.wikipedia.org/ qualifié de « Wikipédia France » alors qu'il s'agit du Wikipédia francophone (mais beaucoup de français partagent ce point de vue étroitement hexagonal) au fondateur de l'informatique, Alan Turing gratifié sur son nom d'un tréma allemand alors qu'il était anglais ! Sans compter la confusion entre « standard ouvert » et open source (voilà ce qui arrive lorsqu'on utilise des mots anglais).

Le passage du temps est impitoyable pour les livres publiés sur papier et l'auteure consacre de nombreuses pages au projet Quaero, disparu avant la publication de l'ouvrage.

La critique de Google reste nécessaire, ainsi que les réflexions pour mettre au point des alternatives mais ce livre ne fera guère avancer ce travail. Il vaut mieux lire « Google God » d'Ariel Kyrou.

La fin du livre, avec un long plaidoyer pour un assouplissement des règles de propriété intellectuelle, pose heureusement mieux le problème. Veut-on diffuser la culture ou bien permettre aux éditeurs de s'enrichir ?

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