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Fiche de lecture : La guerre des Russes blancs

Auteur(s) du livre : Jean-Jacques Marie
Éditeur : Tallandier
979-10-2102280-5
Publié en 2017
Première rédaction de cet article le 26 septembre 2020


Une étude détaillée d'un des camps de la Guerre civile russe, les blancs. Qui étaient-ils, qu'ont-ils fait, et pourquoi ont-ils perdu ?

Après la révolution bolchevique, qui a vu relativement peu de violences, une guerre civile impitoyable démarre entre les Rouges (les bolcheviques) et les Blancs (les tsaristes). Évidemment, c'est plus compliqué que cela : il y a plus que deux camps, et tous les camps sont eux-mêmes divisés. Le terme « les Blancs » regroupe des organisations, des individus et des idéologies différentes, sans compter les groupes difficiles à classer comme celui de Makhno ou comme les Verts (qui n'ont rien à voir avec les écologistes d'aujourd'hui). Le livre est donc épais, car l'auteur a beaucoup à dire.

Les Blancs avaient dès le début un problème politique considérable : fallait-il affirmer qu'on luttait pour la démocratie, voire la république, ou au contraire assumer ses origines tsaristes et motiver ses troupes par des références au passé ? Les Blancs n'ont jamais vraiment réussi à trancher nettement. Leurs soutiens impérialistes comme la France insistaient pour que les chefs blancs tiennent un discours moderniste, rejetant la restauration pur et simple du tsarisme, et prétendant vouloir construire démocratie et élections libres. Et les paysans russes refusaient le retour des grands propriétaires terriens et, pour les gagner à la cause blanche, il ne fallait pas tenir de discours trop rétrograde. Des chefs blancs comme Dénikine tenaient en public un discours raisonnablement progressiste et présentaient des programmes tout à fait acceptables. Sincérité ou tactique ? Car, d'un autre coté, l'écrasante majorité des officiers blancs étaient très réactionnaires et ne voulaient que le retour intégral au système politique d'avant la révolution de février. Et de toute façon, beaucoup de chefs blancs étaient des aventuriers indisciplinés, qui voulaient juste de la baston et du pillage, et ne tenaient aucun compte de ce que pouvaient dire Dénikine ou Wrangel. Les Blancs n'ont donc jamais eu une politique claire et cohérente. Une même impossibilité de trancher est apparue au sujet des questions nationales, comme l'indépendance de la Finlande ; pris entre le désir d'avoir un maximum d'alliés, et leur nostalgie d'une Russie impériale « prison des peuples », les Blancs n'ont pas su utiliser les sentiments nationaux qui auraient pu être dirigés contre les Rouges.

Et puis il n'y avait pas un parti et une armée unique. Chaque groupe blanc avait son chef, ses troupes, ses sources de financement jalousement gardées. Comme dans le roman « La garde blanche » de Mikhaïl Boulgakov ou dans la BD « Corto Maltese en Sibérie » d'Hugo Pratt, les Blancs ont passé plus de temps à se déchirer, voire à se combattre, qu'à lutter contre les Rouges.

Rapidement, les pays impérialistes qui soutenaient les Blancs ont compris qu'il n'y avait pas d'espoir qu'ils triomphent, et ont petit à petit abandonné leurs alliés. Churchill, dont le rôle pendant la Seconde Guerre mondiale ne doit pas faire oublier que dans le reste de sa carrière politique, il a toujours été ultra-réactionnaire, et a commis d'innombrables erreurs graves de jugement, insiste pour que la Grande-Bretagne continue à s'obstiner à aider les Blancs, mais sans résultat. (J'ai appris dans ce livre que plusieurs officiers blancs, devenus « soldats de fortune », encadreront l'armée paraguayenne dans la guerre du Chaco.) La défaite des Blancs étant sans doute inévitable. Ce livre vous expliquera pourquoi, dans un excellent chapitre final de synthèse. (Les divisions des Blancs et leur manque de programme cohérent ne sont pas les seules explications.)

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