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Mon livre « Cyberstructure »

Ève

Capitole du Libre 2019

Première rédaction de cet article le 18 novembre 2019


Le 16 et le 17 novembre 2019, c'était Capitole du Libre à Toulouse, un rassemblement libriste à ne pas manquer. Plein de rencontres, d'ateliers et de conférences intéressantes.

C'était aussi le premier anniversaire du mouvement des Gilets jaunes, marqué par de nombreuses manifestations.

J'y ai fait une séance dédicace de mon livre « Cyberstructure », qui avait été annoncé pour la première fois publiquement au Capitole du Libre de l'année dernière. La séance était organisée par la librairie « Les petits ruisseaux ». J'étais à côté de David Revoy, l'auteur de Pepper et Carrot, qui faisait de superbes dessins. dedicace-petits-ruisseaux.jpeg

J'ai fait un exposé sur le protocole QUIC, qui était en cours de normalisation à l'IETF (il a depuis été normalisé et les RFC publiés). Voici la version en PDF pour présentation, la version en PDF pour impression et le source en LaTeX/Beamer. La vidéo est disponible (et également sur GoogleTube). Il y a aussi d'excellentes sketchnotes (par Kevin Ottens, merci à lui.) Version complète sketchnotes-cdl2019-small.png

Le programme de Capitole du Libre était très riche. J'ai beaucoup aimé la présentation de Marina Fernández de Retana (alias Kaoseto), l'auteure du « Cycle de Shaedra ». (Sa présentation sur YouTube.) Ses romans ne sont pas écrits avec un gros logiciel WYSIWYG comme LibreOffice (a fortiori pas en Word), mais dans un langage de balisage, du WYSIWYM. Un des gros avantages des outils WYSIWYM est l'intégration aux outils externes comme grep ou git (là où l'obésiciel doit réinventer en moins bien tous ces outils externes.) Après avoir essayé LaTeX (messages d'erreur insupportables) et Markdown (pas de balisage sémantique, on ne peut pas créer ses propres balises, encore qu'il existe des extensions utiles pour l'écrivain comme Manuskript ou Crowbook), l'auteure a finalement choisi Frundis. Frundis permet notamment de créer ses propres balises sémantiques, même pour la poésie, et de produire ensuite facilement du bon PDF (pour l'impression) et du du bon EPUB (pour lire sur écran). (Au passage, j'ai suivi une démarche du même genre pour mon livre, mais c'est plus rare chez un·e romanci·er·ère.) À noter qu'elle tape le Frundis avec vim sur un clavier Bépo.

Question Frundis, si vous voulez un exemple ultra-court (Frundis peut faire bien mieux), voici :

.X set lang fr
.X set document-title "Quel beau titre"
.Ch Test
Comment ça va ?
.P
Début, puis un lien :
.Lk https://cyberstructure.fr/ "Mon livre"
.P
Suite, lorem, ipsum, dolor, et tout ça.    
  

J'ai installé le logiciel en suivant les instructions dans le README et ça marche :

% frundis -T latex -s -o test1.tex test1.frundis     
  

produit un fichier LaTeX à partir duquel on peut faire un PDF.

% frundis -T xhtml -s -o test1.html test1.frundis    
  

produit de l'HTML. Notez que Frundis corrige certaines erreurs, comme de mettre un espace ordinaire (au lieu de l'espace insécable) avant un point d'interrogation :

frundis: test1.frundis:3:Ch: incorrect regular space before '?'
  

Je n'ai pas aussi bien réussi avec EPUB, il faudra que je regarde ça.

Dans la conférence « Rien à cacher ? Vous devriez. », Julien Osman a expliqué très clairement les enjeux actuels de la protection des données personnelles, face aux capacités modernes du machine learning. « Le machine learning est à la data ce que sont les raffineries au pétrole. [Ça transforme un truc qui, brut, n'a aucun intérêt, en un truc qui rapporte.] » Ainsi, cette technique permet d'identifier les points sensibles d'un individu, ceux où une publicité ciblée sera efficace (comme dans le cas de Cambridge Analytica.) « Aujourd'hui, notre gouvernement est plutôt bienveillant. Il installe des caméras de vidéo-surveillance partout, pour que la Mère Michel arrête de perdre son chat. Mais, demain, avec la reconnaissance faciale et un gouvernement moins bienveillant, cela donnera quoi ? »

Taziden est revenu sur « Censure de sites imposée aux FAI : où en est on ? ». Il a notamment noté qu'on n'avait pas de liste consolidée de tous les noms de domaine censurés par l'autorité judiciaire. Certes, les décisions de justice sont publiques, mais il n'existe pas de liste de synthèse, rendant difficile l'évaluation de l'ampleur de la censure. Pour mesurer le degré d'application de cette censure, Taziden suggérait OONI mais aussi les sondes RIPE Atlas (le programme Blaeu permet de voir la censure de Sci-Hub aujourd'hui en France). La censure administrative (par la police) est évidemment encore plus opaque, on a seulement un rapport annuel agrégé. En 2018, il y a eu 879 demandes de blocage. Notez que des sites Web ont retiré des contenus, par peur de se retrouver dans la liste de blocage (cf. lettre de menace affichée pendant l'exposé). Les blocages effectivement faits ne montrent donc qu'une partie de la censure administrative. L'orateur a rappelé que la CNIL est censée garder un œil sur cette censure administrative. Suite à la demande de retrait et de blocage d'Indymedia Grenoble & Nantes, l'orateur a fait une demande afin d'obtenir des documents et il les a eu. Ils montraient que la police et la CNIL n'étaient pas d'accord. Le tribunal administratif de Cergy a d'ailleurs annulé les décisions de blocage des sites Indymedia le 1 septembre 2019. Pour contourner cette censure, Taziden a cité les résolveurs DNS publics. Attention : si on y accède en UDP (le cas le plus courant), on n'a aucune authentification, aucune intégrité, et aucune confidentialité. Utilisez plutôt DoT (DNS sur TLS) ou DoH (DNS sur HTTPS). Ainsi, le résolveur DNS public de LDN, 80.67.188.188 a DoT (voir ce test avec le client DoT Homer).

Un mot aussi sur deux activités d'aide au développement avec du logiciel libre, « Le logiciel libre au service de l'éducation en Guinée » par Kovann Ly (association EDA - Enfants De l'Aïr) et « Afrikalan : rendre les logiciels libres éducatifs accessibles hors des pays du nord » par l'association Bilou Toguna. EDA a de nombreuses activités (santé, éducation, agriculture) mais la partie qui intéresse plus directement le Capitole du Libre, c'est l'accès au numérique dans l'éducation. Un des problèmes dans la zone des mines d'or est que certains parents mettent leurs enfants à la mine plutôt qu'à l'école. Pour encourager la scolarisation, l'école doit être « sexy » et c'est là que l'informatique joue un rôle. Mais installer vingt PC normaux dans une salle dépasse les capacités du groupe électrogène (il n'y a pas de réseau électrique), d'où le choix des Raspberry Pi. Les Raspberry Pi sont connectés entre eux en WiFi mais les établissements scolaires n'ont pas d'accès Internet (notez que l'administration scolaire n'est pas chaude, par peur de l'Internet). Une copie de Wikipédia est donc disponible sur le serveur (qui est dans un très beau boitier en bois fait par le menuisier local.) Pas mal de logiciels libres sont installés sur les postes des élèves, dont Scratch. L'expérience avec les Raspberry Pi est positive : matériel très robuste, malgré l'électricité déconnante, et faible consommation électrique (ce sont les écrans qui consomment l'essentiel). Par contre, il faut fréquemment dépoussiérer, pour enlever la latérite. L'autre conférence, « Afrikalan : rendre les logiciels libres éducatifs accessibles hors des pays du nord » ou « Pourquoi les pingouins devraient plus souvent aller dans les écoles d'Afrique » portait, en dépit de son titre, plutôt sur le périscolaire. En effet, une des difficultés dans l'enseignement au Mali, où intervient l'association, est que les enseignants sont peu autonomes. Ils ne créent pas leur propre contenu pédagogique, ils appliquent. Cela rend difficile de créer des variantes (logiciel libre au lieu de privateur). D'où le choix d'Afrikalan de travailler plutôt dans un cadre périscolaire. Entre autres, Afrikalan utilise les nombreuses activités conçues par des enseignants pour des enfants d'âge très divers par Pepit. Souvent, les adultes dans l'école s'approprient les ordinateurs qui avaient été installés pour les enfants, l'ordinateur étant un objet de prestige, et les adultes n'en ayant pas pour leur travail. Il faut donc des objets qui ne soient pas considérés comme des ordinateurs. Et, comme EDA, Afrikalan utilise le Raspberry Pi, qui n'est pas moins cher (compte-tenu du prix de son écran), mais qui fait l'objet de moins de convoitises.

Et sur les réseaux sociaux décentralisés ? J'ai été moins convaincu par « Zot : aux frontières des réseaux fédérés avec Hubzilla et Zap » d'Ale Abdo mais il est vrai qu'il a manqué de temps pour présenter ces systèmes pas évidents. Hubzilla (qui a changé de nom plusieurs fois) utilise le protocole Zot pour fournir un réseau social décentralisé. (Il y a une passerelle vers ActivityPub, pour parler aux fédiversiens.) Une des originalités est que l'identité (et les contacts) peuvent se promener d'une instance (« hub ») à l'autre, en copiant sa clé privée et son profil. Quant à Zap, c'est une scission de Hubzilla, qui se concentre sur l'aspect réseau social (Hubzilla peut faire plein d'autres choses).

Mille mercis à Toulibre et à tous les organisateurs (vous pouvez suivre un interview de ceux-ci.) Photo de Matthieu Herrb : capitole-du-libre-2019-fin.jpg

Autre(s) lecture(s) sur cette édition de Capitole du Libre :

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